résumé
Le regard d’Yvan s’attarda sur un cliché : une photo prise dans le Fezzan libyen près de la ville de Sebha. (…)
Que de chemins et de pistes parcourus pendant un peu plus d’un demi-siècle… Que de bouleversements vécus, alors que l’Occident contemplait son image en miroir, ressassait ses tabous, pariait sur la fin de l’Histoire et sur une prospérité perpétuelle. (…)
Pour tromper l’ennui, il glissa le DVD d’Un taxi pour Tobrouk dans le lecteur. La philosophie de cette épopée de l’amitié au désert tenait en une réplique que n’aurait pas démentie Yvan : « Deux intellectuels assis vont moins loin qu’un con qui marche ». Il le visionnait à chaque fois qu’il repensait à Marchal. Marchal, c’était tout le portrait de Biraud, dans le film : râleur et foncièrement fidèle. Pauvre Marchal. Malheureux Sacha. Imprudente Zeinab. C’était plus «fun» à cette époque-là, reconnut Yvan. Plus « fun » dans les films…
Le film de la vie passée, celle des hommes comme lui qui font « la petite histoire », sans avoir toujours le recul nécessaire pour l’intégrer dans la « grande histoire », ressemblait de plus en plus à un scenario raté. Les Soviétiques qui ont dû abandonner la « lutte finale » censée rendre tous les travailleurs de la planète heureux, les Occidentaux avec un projet similaire, la généralisation espérée de la « démocratie », oubliant au passage les spécificités, les désirs des peuples, leurs difficultés à vivre en paix avec leurs voisins au Moyen-Orient « compliqué » par essence, mais aussi en Afrique ; et à présent c’était le tour de l’islam politique et son rêve de « mondialisation voilée », nonobstant des actes terroristes pour faire comprendre aux indécis de choisir le bon camp. Décidemment le temps des « artistes » était bel et bien fini, remplacé par celui des « technos » !
l'auteur
Auteur d’une quinzaine d’ouvrages, Yves Gazzo a mené une carrière partagée entre l’économie – au Tchad puis au Niger avec les Nations Unies, en Libye, au Maroc et en Tunisie avec la FAO, aux États-Unis pour la Banque mondiale – et la diplomatie : en Éthiopie avec accréditation à Djibouti, aux Philippines, en Jordanie avec accréditions au Yémen. Il a dirigé la représentation de la Commission européenne en France et a été ambassadeur de l’UE auprès du Saint-Siège. Il est actuellement ambassadeur de l’Ordre Souverain de Malte accrédité auprès de l’UE. Il a enseigné en troisième cycle de Sciences Po Paris (cours sur le monde arabe contemporain 1985/94) et a toujours développé un appétit pour la littérature et le « passage » des connaissances. Il est membre du jury du Prix Méditerranée depuis 2006, membre de conseils scientifiques ou d’administration de la Renaissance française, de l’ASAF (Association de soutien à l’Armée française) et de l’IRFA (Institut de recherche France-Asie).